A ne pas manquer : Shooting Dogs sur Arte

Lundi soir, Arte a programmé un film remarquable que vous ne devez pas louper : Shooting Dogs! Ce film qui est sorti en 2005 va vous prendre au tripe. Michael Caton Jones revient sur le génocide rwandais de 1994 de manière boulversante et criante de réalisme. Note JPB Production : 5/5

Plus d'infos sur ce film

1 commentaires:

Anonyme a dit…

Dans le deuxième numéro de la revue "La Nuit rwandaise" parue le 7 avril dernier, Serge Farnel fait une critique très détaillée du film Shooting Dogs.

Site web de la revue "La Nuit rwandaise": www.lanuitrwandaise.net

Voici un extrait de cette critique:

La France tirait les ficelles

Les militaires français qui dirigeaient de fait l'armée rwandaise, avaient choisi leur moment précis pour intervenir à l'Ecole Technique Officielle (ETO). C'est ainsi que l’armée française mit la force onusienne, responsable, en principe, de la protection des expatriés européens et des civils, devant le fait accompli. Le capitaine Luc Lemaire, de la force belge de l’ONU, à l’occurrence de l’arrivée des Français, requit et obtint de ses supérieurs l'autorisation de quitter l'ETO. Ayant, au préalable, reçu du Lieutenant-colonel Dewez l’ordre de se rendre à Gitarama afin d’évacuer des ressortissants belges, il profita de la sécurité offerte par l'escorte française pour évacuer son détachement et abandonner les civils sous sa protection à un massacre certain.

Les excellentes relations de l'armée française avec les génocidaires sont confirmées par de nombreux témoignages concordants rassemblés par African Rights. Notamment par le père Jean-Paul Lebel, qui a indiqué que les Français étaient venus car leurs relations avec les locaux étaient plutôt bonnes alors que les Belges « craignaient l’hostilité locale ».

Le rapport d'African Rights fait état de ce que « l’arrivée des soldats français, reconnaissables au drapeau sur leur uniforme et à leur béret rouge, fut une source de consternation pour les réfugiés. » Le constat précise que « leur appréhension alla croissant lorsqu’ils virent les soldats de la Minuar rassembler leurs affaires, démanteler les fusils des tranchées, démonter leur tente et regrouper tout leur matériel vers l’un des bâtiments principaux ».

Emmanuel Rugangura, lié au Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), fut l’un des seuls Rwandais évacués. Il raconte son transfert par les Français : « Les rues de Kicukiro étaient déjà jonchées de corps quand nous sommes partis. Alors que nous traversions, nous entendions crier “Vive la France !” parmi la foule (hutu) alignée aux bords des routes. » Il explique que son convoi fut ensuite dirigé vers le lycée français : « Lorsque nous sommes arrivés là, les soldats, probablement français, ne voulaient pas nous laisser entrer. Nous sommes restés à l’extérieur sous l’œil narquois des soldats qui gardaient l’entrée. Un peu plus loin, à l’entrée du centre sportif de Kigali, il y avait un barrage routier tenu par les interahamwe. Ils sont venus nous menacer et nous ont dit qu’ils allaient nous tuer pendant la nuit. »

Le soir venu, le soldat qui gardait l’entrée du collège leur a dit de « dégager ». Emmanuel lui répondit alors qu'il préférait être tué par une arme à feu plutôt qu’avec une machette. « Il (le soldat français) a éclaté de rire et est parti. C’était comme s’ils se moquaient de nous. ». Le témoin explique ensuite qu'ils n'eurent pas d’autre choix que de passer la nuit à l’extérieur : « On a profité de l’obscurité et de la pluie pour se glisser sous les véhicules du parking de l’école. Nous étions environ treize. Le jour suivant, une dizaine de camionnettes sont arrivées pour évacuer ceux qui avaient passé la nuit au lycée français. Nous ne faisions pas partie d’entre eux. » Emmanuel doit sa vie au représentant du PNUD qui vint à sa rescousse en véhicule blindé et à qui sa femme demanda alors la raison pour laquelle on refusait de les laisser entrer au lycée. La réponse du coopérant du PNUD fut que Boutros Boutros-Ghali n’avait pas encore donné la permission d’évacuer les locaux.

Le père Louis Peeters a affirmé que, étant donné que « les Français avaient une certaine influence sur la politique rwandaise, comme ils étaient présents au moment de l’évacuation, ils auraient facilement pu escorter les réfugiés jusqu’au stade Amahoro ».

Au lieu de cela, un témoignage tiré du livre Conspiracy to murder (Conspiration pour tuer) de Linda Melvern (Editions Verso, avril 2004, $ 25), nous indique que « les Français promirent aux gens qu'ils allaient rester. » Ce faisant, ils facilitèrent la fuite du contingent belge de la Minuar.

Saving a dog

Les Français n’ont évacué que des responsables politiques hutu proches du noyau dur génocidaire, au centre duquel œuvrait Agathe Habyarimana, la veuve du président tué le 6 avril, elle-même évacuée par le premier avion en partance de Kigali et reçue avec des fleurs offertes par l'Elysée à son arrivée à Paris.

Évacuant les uns, les assassins menacés par l’avance du Front patriotique rwandais, et abandonnant les autres, les civils tutsi à leurs bourreaux, les dirigeants français ont ainsi fait la preuve de leur connivence avec les assassins.

Boniface Ngurinzira, un politicien en tête des listes des génocidaires parmi les personnes à éliminer, avait été amené, avant le 7 avril, à l’ETO, par les casques bleus. Il eut beau supplier les militaires français de l’emmener avec eux, ces derniers lui refusèrent cette faveur. Il fut l’une des victimes du massacre de l’ETO. Aujourd'hui, une Rwandaise a demandé réparation, par voie juridique, du fait qu'il fut abandonné, avec sa famille, par les soldats de l'ONU.

Ces mêmes soldats qui reçurent l'ordre de tirer sur les chiens qui, se nourrissant des cadavres du génocide, commençaient à poser un problème sanitaire. On dit qu'ils commençaient à s'habituer au goût de la chair humaine… Le film Shooting Dogs montre que les soldats de l'ONU préférèrent tirer sur ces chiens plutôt que d’appliquer leur doctrine de légitime défense. Pourquoi ont-ils refusé de tirer sur les piranhas que constituaient les milices interahamwe, dont le nom, signifiant « ceux qui frappent ensemble », rappelle précisément leur mode de prédation ?

Les amis des bêtes ont pu être rassurés en apprenant par l'émission TV BBC/Arte que l'opération Amaryllis avait réussi à procéder à l'évacuation... du chien de l’ambassade de France !